Définition : Sociétal - Le concept de l'Enfer pavé de bonnes intentions
Présentées comme des progrès de société, promues par exemple au nom de l’égalité des sexes ou de la défense des minorités, les réformes dites “sociétales” font en réalité le plus souvent le jeu de la classe dominante.
Que signifie le concept « sociétal » ? C'est un néologisme journalistique très souvent utilisé pour définir les mœurs, la manière de vivre et les us et coutumes.
Parler de sujets sociétaux est donc un excellent moyen pour les médias mainstream de créer de la polémique inoffensive en évitant ainsi d'aborder les questions sensibles : sociales et économiques (inégalités sociales, précarité, logements insalubres, casse du service public, etc.)
En ces temps où les revendications sociétales affluent, il est important de rappeler que le progrès social entraîne le progrès sociétal, mais que l’inverse n’est pas nécessairement vrai.
Pour illustrer une revendication sociétale « au nom de l’égalité des sexes », prenons comme exemple la réforme du congé parental entrée en vigueur en 2015 sous le gouvernement Hollande.
Auparavant, à compter de l’arrivée du deuxième enfant, les parents pouvaient bénéficier d’un congé de trois ans par naissance. N’étant pas attribué spécifiquement à l’un ou l’autre des parents, ce dernier revenait, dans 96% des cas, à la mère.
Mais, constatant que ces longues absences éloignaient les femmes de l’emploi et des promotions, le gouvernement a décidé, au nom de l’égalité des sexes et des carrières féminines, de partager le congé parental.
À l’issue de la réforme, le congé parental a ainsi été coupé en deux sans que sa durée rallonge. Chaque parent ne pouvait plus demander que deux ans pour chaque naissance, dans la limite de trois ans pour le couple.
Dans les faits, voici ce qui s'est passé : dans la grande majorité des cas, les mères ont pris leur congé puis sont retournées travailler au bout de deux ans ; les pères, quant à eux, n'ont pas pris le leur : leur salaire étant souvent le plus élevé du couple, il ne pouvait pas être sacrifié pour les allocations mensuelles de la CAF (1), bien plus faibles (392 euros par mois).
En fin de compte, ce sont les entreprises qui ont le plus bénéficié de la réforme. En effet, elles ont pour ainsi dire “gagné” un an de congé parental non pris, et donc profité d’un an de force de travail supplémentaire.
On voit donc bien, à travers cet exemple, que les réformes sociétales sont le fruit d’une lutte de classes qui va en défaveur des classes populaires. Servant les intérêts de la classe dominante, elles viennent le plus souvent prendre le contrepied d’une évolution et d’une révolution sociale et économique nécessaire.
Précisons ici que nous ne sommes en aucun cas dans un jugement de valeur. Il faut bien distinguer le champ de l’action politique objective du champ théorique. Si, sur le plan théorique, on peut parfaitement être en accord avec une grande partie des revendications sociétales, ce n’est pas pour autant que, à un moment politique donné, ces réformes doivent devenir prioritaires.
Ce qu’il convient de faire, c’est de modifier avant tout les conditions économiques et sociales, car ce sont elles qui, en permettant le développement de l’individualité, déterminent le caractère réellement progressiste du sociétal.