Dossier : La France et l'immigration
Loin de l'universalisme abstrait et larmoyant de la gauche et de la Reconquista fantasmée par les identitaires, nous tentons ici de poser le problème politique que pose l'immigration en France, dans une nation fracturée.
SOMMAIRE DU DOSSIER :
1. Dossier : la France et l'immigration
2. Loi immigration : créer une « armée de réserve » pour le patronat
4. Altérité raciale et immigration : comment perpétuer l'exploitation des travailleurs
François Ruffin, peu après les résultats des élections présidentielles de 2022, signait dans les colonnes du journal Libération une tribune dans laquelle se dressait le constat suivant : la gauche radicale, malgré une belle campagne de M. Mélenchon, a incontestablement échoué à convaincre une grande partie des classes populaires et des Français issus des zones périphériques, encore largement attirés par le vote en faveur de Mme Le Pen et du Rassemblement National. Le fameux « bloc populaire » que ne cesse de revendiquer la NUPES depuis les élections législatives peine à faire valoir cet épithète, ainsi que le montre une sociologie électorale bien comprise et appliquée. C’est que cette gauche, malgré les défaites successives et le désamour croissant qui lui est manifesté, peine à saisir les contradictions profondes qui se déploient au sein du peuple français et sous-tendent les sensibilités politiques des classes populaires. En tête de celles-ci, la question migratoire apparaît sans surprise au premier chef.
Que penser, en effet, d’une gauche qui n’a su trouver le moindre mot pour qualifier le meurtre atroce d’une jeune fille, au moins d’octobre dernier, par une Algérienne visée par une OQTF (1) ? Qui, quelques semaines plus tard, nous gratifie de ses plus belles larmes salées pour « l’outrage » proféré par le député RN Grégoire de Fournas ? Qui gobe sans hésitation, il y a quelques mois encore, les bobards du Ministère de l’Intérieur, prétendant que les incidents du Stade de France étaient dûs à des hooligans anglais biberonnés à la bière ? De moins en moins de Français restent dupes de ces basses manœuvres politiciennes, qui servent avant tout à masquer la question migratoire, érigée au rang de grand tabou inviolable et sacré, et à maintenir un certain électorat bien au chaud dans un nid douillet d’insouciance et de déni.
De l’autre côté du ring se dresse une extrême-droite identitaire, incarnée par Zemmour et autre starlettes youtubesques, qui aiment à leurs heures perdues se peindre le visage aux motifs d’Odin, ou encore, s’il leur en prend la fantaisie, pleurer en regrettant le bon vieux temps ou Godefroy de Bouillon ferraillait en Terre Sainte contre les Sarrasins, ceux-là même qui habitent désormais, bien évidemment, dans nos « quartiers sensibles » modernes. Les Français sont assez peu friands de ces belles histoires ; difficile d’avaler la pilule selon laquelle il faudrait souhaiter, en échange d’une soumission toujours renforcée à la grande bourgeoisie et à l’eurocratie, le droit de dire ou de faire du mal à « l’immigré », figure abstraite faisant toujours fi des déterminations de classe particulières et/ou d’une part réelle du prolétariat français issu de cette immigration qui en subit de plein fouet les effets résiduels, sans pouvoir s’attaquer de manière sérieuse au phénomène de fond.
En vous proposant le présent dossier, nous choisissons de ne pas suivre cette impasse : aux antipodes, d’une part, d’une gauche paternaliste, infantilisante, qui nous fatigue de ses vieux inconscients colonialistes et d’autre part d’une extrême-droite identitaire qui réduit la nation à un invariant biologique inaltérable, nous voulons ici vous présenter quelques pistes pour mener une réflexion sur le sujet de l’immigration, en tant que communistes, patriotes, républicains, conscients de s’inscrire dans la continuité de l’histoire millénaire de la France.
Le premier article se propose d’analyser la dernière loi sur l’immigration, récemment discutée lors des séances de l’Assemblée nationale. La réflexion se porte ensuite sur la question de l’identité, de l’intégration d’une population conséquente issue en majorité de pays dont la culture reste étrangère à notre culture nationale. Cela sera l’occasion de réfléchir à ce que signifie l’identité d’un peuple, comment celle-ci peut évoluer, et sous quelles conditions et modalités peut se faire l’accueil d’une population extérieure. Il sera enfin question de la manière dont le phénomène migratoire est utilisé comme arme idéologique, économique et politique au service de la bourgeoisie, contre le peuple français, issu ou non de l’immigration.
Nous vous souhaitons une bonne lecture !
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