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Esthétique

Quel roman national pour la France au XXIème siècle ?

Face au délitement identitaire et culturel de la France, la création d'un nouveau roman national s'impose. Mais qu'est-ce que la France ?

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Par Aurélien

Lecture 30 min
Avant-propos :

Cet article fait partie d’un dossier qui vise dans son ensemble à identifier et exprimer la ligne esthétique de l’Institut Humanisme Total.


La France et ses ennemis

Pour nous, l’esthétique n’a pas de sens en dehors de l’action politique. Nous nous opposons à toute tendance menant à l’esthétisme, à la contemplation passive. Cette attitude est typique de la bourgeoisie de droite, réactionnaire, qui préfère rêver une France idéale que d’agir concrètement pour sauver la France réelle. L’esthétique doit se réaliser dans la pratique, ce n’est pas une abstraction théorique. Il faut garder à l’esprit qu’elle est une voie sensible d’accès à la vérité. Elle doit donc pouvoir être perçue par nos contemporains s’ils veulent s’identifier à notre combat politique. Or, ce combat, quel est-il ? C’est la reconquête d’une souveraineté intégrale sur le travail et le politique. Il est le prolongement d’un double héritage légué par les deux vieilles France : celle des capétiens qui nous a donné l'État-nation et celle de la République sociale qui nous a donné la liberté et l’égalité.

Comme on l’a vu, avec la destruction de notre culture commune, la nation n’est, pour beaucoup, plus qu’une idée vague. L’identité de la France ne va plus de soi, à tel point que certains envisagent de s’en débarrasser. Ces personnes qui revendiquent fièrement venir d’ailleurs ou de nulle part sont les ennemis de notre projet de renaissance. Ce sont tous les sécessionnistes qui ont décidé de rompre le contrat qui les unissait à la nation. Ce sont les traîtres qui ont renié leur patrie ou bien encore les parasites de l’étranger qui nous rongent de l'intérieur. Maurice Barrès, prophète génial, les avait identifiés il y a plus d’un siècle de cela : ce sont les déracinés. Telle une hydre, ce peuple multiforme a plusieurs têtes qu’il nous faudra couper en même temps pour s’en débarrasser.

Le premier groupe – et c’est probablement le plus important des trois – n’est nul autre que la vieille bourgeoisie soi-disant française, cette pseudo-élite qui n’a eu de cesse dans son histoire de trahir le peuple au nom duquel elle avait fait autrefois une révolution. Il n’est pas une crise depuis le Second Empire où celle-ci, prise de peur, n’a pas su capituler devant les puissances étrangères. Ce fut le cas face à Bismarck, mais c’était encore plus le cas face à Hitler, puis face aux Américains après la guerre. Profondément apatride, cette bourgeoisie déteste la France d’en bas, celle du petit peuple laborieux. Tout au plus jouit-elle des produits de consommation du terroir national pour se vêtir d’un vernis patriote qui fait bon genre, mais elle n’aime pas les producteurs derrière ce terroir. C’est pourquoi elle est responsable du déracinement le plus élémentaire, celui par lequel tout commence : celui du travail. En délocalisant la production aux quatre coins de la planète, elle a arraché la terre, l’acier, la laine des mains des travailleurs. Le travail est le rapport le plus fondamental de l’homme à son environnement. C’est en travaillant que le citoyen contribue à enrichir et faire rayonner son pays. La production est l’acte initial du patriotisme : le producteur se reconnaît dans la nation qu’il a contribué à bâtir de ses mains. Cette bourgeoisie a privé le citoyen de son rapport organique et matériel à sa patrie.

Le second groupe dépend directement du premier. C’est la minorité de racailles, de délinquants et de trafiquants qui parasitent nos banlieues. Bien sûr, nous ne faisons pas de confusion entre ces racailles et les immigrés convenablement assimilés aux lois de la République et aux mœurs de la nation française. Il y en a et ils méritent d’être salués. Malheureusement, ces citoyens d'origine étrangère, bien que majoritaires dans leurs quartiers, s’effacent trop souvent sous la pression et l’omerta imposées par les trafiquants et l'exubérance des jeunes délinquants se coupant de fait du reste de la nation. Parqués par centaines de milliers dans des ghettos comme du bétail dans des banlieues aujourd’hui aux mains des mafias, les étrangers d’origine africaine et notamment maghrébine souffrent d’un phénomène de ghettoïsation économique et culturel. Le repli identitaire induit par cet enfermement rend l’assimilation d’autant plus difficile et renforce les sentiments d’appartenance et d’identification ethnique, clanique et religieuse de fait exogène à la culture française traditionnelle. Pourtant, on aurait tort de croire que ces racailles sont d'authentiques musulmans. À y regarder de plus près, la racaille de banlieue tient plus du lumpen du Bronx qu’à Averroès. Et pour cause, leur sous-culture issue du hip-hop est également d’importation américaine. Du rap américain, les racailles ont récupéré l’ultra-libéralisme propre au gang et aux mafias. Personne n’est plus obnubilé par l’esprit de prédation et le fantasme du self-made man à l’américaine que ces jeunes de banlieue. De ce fait, ils sont totalement solubles dans la mondialisation et dans la société du désir libéral-libertaire. Ce sont en réalité eux aussi des déracinés aux consciences atomisées, ce qu’ils compensent par un Islam, le wahabisme, fétichisé, réifié, réduit à ses interdits et ses dérives les plus fanatiques, ingurgité jusqu’à la saturation à coups de Tiktoks et autres contenus poubelles glanés sur internet.

Enfin vient le dernier des grands ennemis : la bobocratie de gauche, donneuse de leçons, moralisante à outrance, haineuse et revancharde. Cette frange de la population typique des nouvelles couches moyennes supérieures a elle aussi décidé de faire sécession avec la nation. Elle constitue la branche intellectuelle de l’hydre anti-nationale. Hautement placée dans toutes les chaires universitaires, dans les médias, sur les réseaux sociaux, c'est elle qui assure la propagande déconstructiviste. Son objectif ? Détruire, au nom d’on ne sait quel bien, tout ce qui a fait la France. La famille ? patriarcale. Les hommes et les femmes ? sexiste. La culture française ? coloniale. L’État ? raciste. L’armée ? impérialiste. La souveraineté ? fasciste. La morale ? totalitaire. C’est la grande croisade des marginaux invertébrés contre tout ce qui fait la beauté et la grandeur. Elle détruit les repères fondamentaux qui sont censés aider notre jeunesse à devenir des citoyens et des citoyennes libres, sûrs d’eux-mêmes. Son idéal anthropologique est l’enfant, pourri gaté de préférence, capricieux, incapable de maîtriser ses désirs. Elle veut arracher l’homme à tout ce qui fait de lui un être situé dans le temps et dans l’espace pour qu’advienne la communion des racailles avec les transgenres sur une planète sans frontières, sans nations. Bref, il ne nous semble pas nécessaire d’épiloguer sur cette catégorie de personnes bien identifiables. Nous croyons nos lecteurs déjà suffisamment renseignés sur leur cas.

L’histoire de France par ses grand hommes

Voilà qui sont les ennemis de la renaissance française. Nous savons désormais contre qui mener bataille pour reconquérir notre pays. Mais à ce stade, si nous savons contre qui combattre, nous restons désarmés. Nos opposants bénéficient tous d’un récit à même de convertir le peuple pour le détourner de ses intérêts. Pour nous, patriotes, ce récit doit avoir pour fonction de ramener le peuple à l’histoire de France : il nous faut un nouveau roman national autour duquel s’unir en tant que nation. Roman national que nous ne confondons pas avec l’histoire comme discipline scientifique, mais là n’est pas le sujet. Disons-le d'emblée, nous renvoyons dos à dos les partisans réactionnaires qui ne jurent que par l’Ancien Régime et les idiots faussement progressistes qui ne voient dans la France qu’une République abstraite de même pas trois siècles. Notre conception de la France est unitaire. Pour nous qui sommes dialecticiens, une chose n’a de sens que dans son développement. L’histoire de France est un processus en perpétuelle construction, ce qui n’empêche pas de saisir des tendances. La France est une totalisation en cours dont l’identité se construit dans l’action. C’est du moins la pensée commune du général de Gaulle et de Maurice Thorez, récupérant tous deux au début de leurs mémoires cette citation de Goethe stipulant que « au commencement était l’action ». Régis Debray nommera cette métaphysique de l’acte transposée à la patrie un « existentialisme de la nation ».

Or qu’est-ce que la France ? Paraphrasant le Général répondant à Malraux, on pourrait répondre en inversant l’ordre des termes : le peuple. La France, c’est ceux qui l’ont faite, que ce soit son peuple ou ses grands hommes. Mais alors, que donc ces hommes et ces femmes ont-ils bien pu faire pendant plus d’un millénaire d’histoire ? Répondre à cette question de façon détaillée reviendrait à produire un livre complet sur l’histoire de notre beau pays. Ce n’est ni le lieu ni l’objectif de notre présent écrit. Notre but est de donner à voir, à se représenter ceux qui ont pu faire la France tout au long de son développement. Une liste exhaustive serait impossible et nous ferait manquer l’essentiel. Il nous faut saisir le meilleur des hommes et des femmes qui surplombent leur époque. Ces figures doivent devenir les clefs de voûte qui soutiennent le peuple que nous voulons régénérer. Et surtout, elles doivent répondre aux enjeux de notre temps.

Ainsi nous avons l’honneur de nous placer sous le patronage de Philippe II Auguste qui incarne si bien la glorieuse dynastie des capétiens à laquelle s’est identifiée l’histoire de notre nation pendant des siècles et des siècles. Les capétiens représentent la conquête de l’unité du royaume de France jusqu’à ses frontières naturelles. Ce sont ces rois modernisateurs qui ont mis les féodaux au pas, qui ont donné à la France son sens de l’État. Philippe Auguste est non seulement un héros de guerre qui s’est illustré lors de la bataille de Bouvines contre les Anglais, mais c’est aussi un visionnaire qui mène de grandes réformes administratives chargées d’asseoir l’autorité de l’État dans le royaume.

Au sortir du Moyen Age, nous revendiquons certainement la figure de sainte Jeanne d’Arc, fille du peuple qui représente pour l’éternité la détermination des Français à résister à tout ce qui s’oppose à eux. En boutant les Anglais hors de France et en conduisant Charles VII vers son sacre, elle restaure les conditions nécessaires pour l’unité du royaume qui retrouve son indépendance. Sa foi déterminée, en dépit des malversations des prêtres qui veulent la condamner, nous met en garde contre les abus du pouvoir religieux.

C’est au tour de la Renaissance d'apparaître en la personne de François Rabelais, l’auteur de Gargantua et Pantagruel. Rabelais est à la fois une figure de proue de l’humanisme classique et de la culture populaire. C’est un chrétien anticlérical favorable au grand mouvement de redécouverte des auteurs antiques qui se répand alors en Europe. Il est aussi médecin, ce qui lui donne un rapport pratique au corps en dehors des dogmes en vigueur, beaucoup plus terre à terre. C’est cette activité qui va le rapprocher de cette culture bonhomme et paillarde de la paysannerie. Rabelais est un bon vivant qui aime l’humour et les tablées populaires qui sont pour lui les bases d’une vie simple contrastant avec le faste et les abus des princes de son temps. Il est pour nous une figure très précieuse en ces temps de retour au puritanisme et à la censure.

Dans un tout autre registre, nous passons à Louis XIV, dit le Roi Soleil. Il incarne une splendeur qui fait aujourd’hui encore la réputation de la France. Louis XIV, c’est Versailles, c’est la cour et toute sa suite luxueuse. Mais par-dessus tout, il incarne l’État dans toute sa force et sa majesté. C’est sous son règne que s’établit définitivement le socle de l’État-nation tel que nous le connaissons. En devenant absolue, la monarchie centralise tous les pouvoirs dans un seul homme qui s’identifie au destin de sa nation. Il soumet définitivement les provinces à l’autorité royale, qu’il exerce aux côtés de Richelieu et de ses ministres restés célèbres : Mazarin, Colbert, etc. Avec lui la France prend la dimension planificatrice et centralisée qu’on lui connaît. C’est enfin un protecteur des arts qui contribuera au succès du théâtre classique français dont notre langue est si fière.

Après le Grand Siècle vient le siècle des Lumières au-dessus duquel trône Jean-Jacques Rousseau, ce modeste citoyen de Genève qui repose aujourd’hui au Panthéon, juste en face de Voltaire, son rival. Rousseau est le grand penseur de la modernité. Avant tout le monde il a su voir l’ensemble des contradictions qui agitent nos sociétés. Il fut un penseur radical des inégalités, de l’injustice. Il a donné à la France l’idéal républicain en lui fournissant le contrat social qui a fait descendre l’autorité du roi dans le peuple. En avance sur son temps, il rejetait dos à dos le matérialisme bébête des Lumières et le surnaturalisme béat des prédicateurs religieux au profit d’une pensée profondément humaniste, mettant la notion de responsabilité et de liberté au centre de la vie humaine. C’est un homme à l’âme douce qui aimait se réfugier dans la nature pour fuir la vue de la misère et de la jalousie qui avilit l’homme. Il fut malheureusement persécuté pour sa bonté.

C’est alors qu’intervient dans le vacarme de cette Révolution qui devait bouleverser la terre entière celui qui se faisait appeler l'Incorruptible : Maximilien Robespierre. Il est sans doute le personnage de notre histoire sur lequel il a été écrit le plus de mensonges et de calomnies. Quoi de plus normal ? Son souvenir hante la bourgeoisie car il la met face à ses responsabilités. Robespierre est celui qui, avec les Jacobins, a voulu pousser la Révolution jusqu’au bout. Nourrit de ses lectures de Rousseau, l'Incorruptible ne voulait pas d’une révolution à l’anglaise. Il voulait une république centralisée et unitaire, héritière en ce sens de l’État monarchique. Avocat de profession, il était le défenseur du petit peuple de Paris à l’Assemblée. Sans lui, la Révolution eut été bien différente ; elle n’aurait été que la prise de pouvoir de la bourgeoisie. Avec lui, la République était déjà sur la voie du socialisme. Malheureusement, son temps au pouvoir ne fut que de courte durée. Confrontée à trop de désordres internes et externes, la République jacobine sera avortée, mais elle laissera un souvenir indélébile dans la mémoire des socialistes du monde entier.

Il faudra le secours de Napoléon Bonaparte pour que les acquis de la Révolution se concrétisent dans le temps. Celui que Hegel appelait « l’âme du monde » a incarné pendant un temps le progrès humain apporté par la Révolution à lui tout seul. Nous écrivions, lors du bicentenaire de sa mort, que « l'intelligence de Napoléon aura été de ramener l'Histoire à la raison en reculant d'un pas pour en avancer de deux. » C’est lui qui « acte la fin définitive de la vieille féodalité et de l'Ancien Régime, instaure les prémices de nos institutions, nous fait passer d'un monde substantiel au monde de la convention par le Code civil. » Si l’Empire n’est pas pour nous un modèle, l'épopée napoléonienne aura fait connaître la France au monde entier. Son exercice du pouvoir est un exemple de fermeté qui caractérise si bien la raison d’État à la française.

Le siècle qui s’ouvre est un siècle marqué du sceau de la contre-révolution. Que ce soit avec la Restauration, la monarchie de Juillet ou le Second Empire, la France peine à retrouver la voie dessinée par la Révolution. Par chance, au plein cœur de ce siècle tumultueux éclate la Révolution de 1848, qui débouchera sur la Seconde République qui, en un laps de temps très court, nous aura donné le suffrage universel masculin et abolit l’esclavage. Parmi les hommes qui feront cette République, on compte Lamartine, bien sûr, mais aussi Victor Hugo. Humaniste convaincu, Hugo va mettre sa plume de génie au service de tous les Gavroche et toutes les Cosette qui peuplaient les rues de la Ville Lumière. Il est sans doute l’un des plus grands écrivains français à avoir dédié sa vie aux misérables de France, dont la reconnaissance le suivra jusqu’à son dernier voyage où, comme un seul homme, le petit peuple de Paris s’était levé pour saluer un dernière fois le poète.

Malheureusement, cette seconde République va crouler sous le poids de ses contradictions. Le suffrage universel avait donné aux ouvriers le goût de l’égalité et de la politique. Un trop grand nombre de bourgeois y siégeaient et face aux exigences des travailleurs pour une république sociale, la Seconde abdiqua à la faveur d’un retour à l’Empire. Le règne de Napoléon III fut celui de l’industrialisation de la France et de l’entrée des ouvriers dans l’histoire. Plus tard, quand Napoléon III se rendra face à l’invasion allemande, ce seront ces mêmes ouvriers qui sauveront l’honneur de la France face à l'envahisseur. C’est la Commune de Paris et ses fameux communards. Même si elle fut un échec, leur révolution est la première révolution socialiste au monde. Elle a marqué non seulement l’histoire de notre pays mais aussi du monde entier d’un poinçon rouge, rouge comme la couleur du sang de l’ouvrier. Les communards ont enseigné aux travailleurs du monde entier jusqu’à nos jours que leur sort n’était pas une fatalité, que la révolution était possible.

Trop souvent confondu à tort avec le nationalisme ou encore le chauvinisme, le patriotisme au contraire se confond et se conjugue avec la nation comme reflet du peuple et des classes populaires. Nous défendons un patriotisme qui ne peut que s’articuler avec un internationalisme bien compris contre tout impérialisme, réel fauteur de guerre. La France, la République, le socialisme, voilà les grandes lignes de notre doctrine.
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Ils seront malheureusement réprimés violemment par des usurpateurs, des républicains de pacotille pour qui le mot de « république » avait un sens fort éloigné de celui que pouvaient lui donner les Jacobins. Mais l’histoire ne fait jamais les choses par hasard, et c’est ainsi qu’au milieu de ce fourvoiement de la République dans le parlementarisme bourgeois se leva la figure de Jean Jaurès. Immense dialecticien, Jaurès théorise les prémices d’une voie française vers le socialisme. Il est d’accord avec les théories de Marx à propos du communisme mais considère qu’il faut l’adapter à la réalité nationale. Il renoue le mouvement ouvrier avec l’héritage du jacobinisme et fait de la république sociale le nouvel idéal. Mais ce n’est pas tout : il est aussi l’artisan habile de la laïcité, lui catholique pratiquant, qu’il considère comme un droit à la foi, opposé aux athées militants et aux fanatiques de l’Ancien Régime. Son engagement est total, il collabore à plusieurs journaux et crée ce qui deviendra le journal officiel du Parti Communiste français : L'Humanité. Militant pour un anti-impérialisme radical, il s'oppose à ce qui deviendra la Première Guerre mondiale, ce qui lui coûtera la vie puisqu’il est lâchement assassiné le 31 juillet 1914.

Après l'orage d'acier, un court moment d'accalmie. Alors que le fascisme monte partout en Europe, le Parti Communiste français désobéit à Moscou et s'allie avec le parti réformiste de la SFIO pour mener un Front populaire de 1936 à 1938. Les communistes marchant dans les pas de Jaurès appuient une ligne républicaine et sociale radicale afin d’obtenir les congés payés et la semaine de 40h. Hélas, l’Allemagne hitlérienne déclare la guerre à la France qui termine sur l’instauration du régime de Vichy. À Londres, le général de Gaulle organise la Résistance. Il nomme à sa tête un préfet de conviction radicale-républicaine : c’est Jean Moulin. Il réussit la prouesse d’unir à l'intérieur du Conseil National de la Résistance (CNR) tous les mouvements d’opposition au maréchal Pétain, des forces gaullistes au Parti Communiste. Il est ensuite capturé et torturé par les nazis jusqu’à en mourir sans jamais rien révéler des secrets qu’il connaissait. Son héroïsme et sa détermination restent encore aujourd’hui un exemple de virilité républicaine. Son œuvre, le CNR, lui survivra, et avec lui son programme nettement influencé par les communistes qui arracheront de haute lutte le régime général de Sécurité sociale, le statut de la fonction publique et la construction d'EDF.

Après guerre, les Français les plus pauvres ont du mal à se loger. La France est un pays avec des logements vétustes. Souvent les familles partagent à deux générations les mêmes espaces insalubres et non équipés pour résister aux vagues de grand froid. L’État ne se préoccupe guère du logement, les Français sont livrés à eux-mêmes dans la précarité la plus extrême. En 1954, l’hiver est particulièrement rude, il fait plusieurs morts. Face à la tragédie se dresse un abbé resté célèbre pour son action en faveur des plus démunis : l’abbé Pierre. Élevé dans une famille bourgeoise, il rentre dans les ordres en 1931 et fait vœu de pauvreté. Il va s’engager dans la Résistance aux côtés du général de Gaulle. Sous la Quatrième République, il entame une carrière de député. Sans pour autant être communiste, l’abbé Pierre a des sympathies pour le socialisme qu’il gardera toute sa vie ; c’est également un républicain. Au cours de ce funeste hiver, il lance un appel solennel au don pour sauver ceux que l’État a abandonnés. Il récoltera la somme très importante de 500 millions de francs. De quoi l’abbé Pierre est-il le nom ? Il est la personnification de cette France catholique au service des plus humbles. Celle des curés des campagnes et des paroisses de quartier. Il nous rappelle que la France est fille aînée de l’Église et que l’idéal républicain et socialiste n’est pas contraire à la foi chrétienne.

Il ne nous reste enfin plus qu’à désigner l’éléphant dans le corridor, celui qui couronne avec sa stature altière de militaire vieille France toute l’histoire de notre nation. Nous parlons bien évidemment du général de Gaulle. Charles de Gaulle n’est pas l’homme d’un seul mandat ou d’un seul coup d’éclat. Il est la France toute entière incarnée dans un seul homme qui a su, tout au long de sa carrière, mesurer et canaliser les contradictions agissant à l'intérieur de la France pour les dépasser dialectiquement. Le Général, c’est tout d'abord la réconciliation du nationalisme avec la République. Élevé dans une famille à la fois maurassienne et dreyfusarde, de Gaulle va hériter « d’une certaine idée de la France » qui ne sera pas entachée de l’infamie dans laquelle l’avaient plongée les nationalistes durant l’affaire Dreyfus. C’est ensuite l’homme de la Résistance, celui de l’Appel du 18 juin, dont la perspicacité lui fit prendre conscience qu’il menait un double combat, à la fois contre les Allemands mais également contre les Américains qui préparaient déjà pour la France un plan de domination avec l’AMGOT. Enfin, il est pour tout souverainiste en général l’incarnation même de la souveraineté de par sa conception de l’État planificateur, interventionniste, protectionniste. Pour nous en particulier, il est surtout le penseur d’une théorie de la participation des travailleurs à la planification économique, faisant ainsi office de précurseur non communiste du souverainisme intégral.

Voilà dressés à grands traits les portraits qui habitent la frise de notre histoire. Quelles leçons sur l’identité française pouvons-nous tirer de cette rétrospective ? Tout d’abord, que l’histoire française ne forme qu’un seul bloc, que la République ne s’oppose pas à l’Ancien Régime. Elle prolonge son œuvre et l’étend à tous ceux qui font la France en partageant sa souveraineté dans le contrat social. Son dévoiement en une espèce de monstre administratif dévirilisé n’est pas le fait de la République elle-même mais de ceux qui n’ont jamais voulu assumer de pousser la logique jusqu’au bout. Après tout, quoi de plus normal ? Qui pourrait attendre d’une classe parasitaire qui consomme sans produire d’assumer, à l’instar de nos rois, la charge du pouvoir avec la responsabilité que ce devoir impose ? La souveraineté ne peut être assurée par des gens qui ne sont pas d’abord souverains sur eux-mêmes. La vérité, c’est que la bourgeoisie déteste la liberté : sa soumission à l’étranger, à la racaille, en témoigne. La véritable liberté, celle de Rousseau, que permet la République, n’est pas une affaire de châtrés. Elle suppose de regarder la mort en face et d’assumer la gravité de ses actes.

La liberté est la véritable passion française et avec vient sa nécessaire défense. À travers toute leur longue histoire, les Français se sont illustrés dans l’esprit de sacrifice dont ils étaient capables pour protéger l’unité de leur territoire et protéger leur liberté. Cette liberté, les Français la partagent sans commune mesure. Si un seul est libre, alors tous le sont. Elle est ce qui les relie en tant que peuple. C’est pourquoi ils se font de l’égalité une haute idée. Elle est le socle nécessaire pour assurer la liberté de chacun. C’est pourquoi le socialisme s’intègre si bien à la dynamique de notre pays.

Cette liberté, les Français l’emploient à perpétuer la culture de leurs pères et à la réinventer. Cette culture, c’est un savoir-vivre qui allie la splendeur à la nonchalance, les plaisirs simples à la richesse d’un terroir. Cela peut sembler bien peu de chose. Et pourtant, il faut voir comment la Terre entière nous envie ce petit rien. Tous les peuples du monde affluent en France pour goûter eux aussi un peu de cette douceur de vivre. Souvent elle leur semble insaisissable, à la limite de l'impertinence, mais drapée d’une élégance face à laquelle on pardonne tout. Le général de Gaulle se représentait la France à la manière d’une jeune femme blonde. Une sorte de princesse franque du fond des âges. Il était persuadé qu’elle nous survivra tous, malgré les affres de l’histoire. Si les peuples ont une âme et que les tendances de fond sont bien une réalité dans l'histoire, on peut légitimement croire que la princesse France se sortira encore une fois des serres des aigles de toutes sortes qui souhaitent la dévorer. Mais s’il est bien une chose que le Général nous enseigne, c’est que ce sauvetage ne se fera pas tout seul. Au commencement était l’action, répétons-le ! Si la France s’est toujours sortie des pires embûches que l’histoire a semées sur sa route, c’est par la vaillance de ses enfants. Aujourd’hui nous sommes à nouveau cette génération dont la mission est de renouveler ce sauvetage. La renaissance est possible, nous l’avons faite mille fois. À nous de la saisir si nous le voulons réellement. Voilà l’essence de la liberté. Voilà l’identité de la France.

« La République... notre royaume de France. »
Charles Péguy

En guise de conclusion

Qu’est-ce que la renaissance conservatrice ? Plus qu’un programme politique, c'est une conception de l’homme qui réintègre celui-ci dans son milieu et son histoire. Ce n’est pas un esthétisme passéiste qui fige les formes du passé dans une image d’Épinal déshumanisée. Elle renvoie dos à dos le progressisme naïf qui veut faire table rase du passé et la réaction qui souhaite revenir à un état antérieur fantasmé. C’est une esthétique qui prend acte des hommes tels qu’ils sont au cœur de la décadence et leur propose une voie de sortie qui n’est pas un retour en arrière illusoire mais la continuation de tout ce qui a été grand. En tant que tel, ce n’est qu’un canevas, une série de principes abstraits dont chaque nation peut se saisir pour retrouver le cours de son histoire. C’est un remède contre le mondialisme, mais ce remède est universel. Son objectif n’est pas de replier les peuples sur eux-mêmes. Au contraire, la renaissance conservatrice veut les délier pour qu’ils puissent se relever et se regarder en égaux. Sans identité, sans racines, un peuple n’est rien. Il ne sait pas à qui s'identifier, ce qui le rend particulièrement vulnérable aux attaques et influences de ses ennemis. La renaissance conservatrice, c’est un idéal de lutte qui fait de la tradition la condition d’accès au progrès.

Et c’est sur cette notion de tradition que nous souhaitons conclure en laissant la parole au cinéaste, écrivain et poète communiste Pier Paolo Pasolini, dont l’œuvre et le combat contre l’impérialisme américain l’ont amené à renouer avec les traditions de sa propre patrie :

« Je suis une force du Passé
Tout mon amour va à la tradition
Je viens des ruines, des églises,
des retables d’autel, des villages
oubliés des Apennins et des Préalpes
où mes frères ont vécu.
J’erre sur la Tuscolana comme un fou,
sur l’Appia comme un chien sans maître.
Ou je regarde les crépuscules, les matins
sur Rome, sur la Ciociaria, sur le monde,
comme les premiers actes de la Posthistoire,
auxquels j’assiste par privilège d’état civil,
du bord extrême de quelque époque
ensevelie. Il est monstrueux celui
qui est né des entrailles d’une femme morte.
Et moi je rôde, fœtus adulte,
plus moderne que n’importe quel moderne
pour chercher des frères qui ne sont plus.
»

→ À lire aussi : Pour une renaissance conservatrice

Le Serment des HoracesLe Serment des Horaces (Jacques Louis David / Wikipédia)

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