picto facebook Institut Humanisme Total picto youtube affranchi IHT picto twitter Institut Humanisme Total picto instagram Institut Humanisme Total picto discord Institut Humanisme Total picto flux rss affranchi
Accueil  ⟩   Actualités  ⟩   International
Néolibéralisme

Catastrophe ferroviaire en Grèce : la logique libérale tue

Le drame qui s'est produit sur le réseau ferroviaire grec suscite un vaste mouvement de protestation dans un pays qui a été dévasté par la Troïka et la gestion néolibérale de l’État.

Partager
( / )
×
Par Aurore B.

Lecture 4 min

Le 28 février dernier, à 23h30, un convoi de marchandises et un train Intercity avec 342 passagers et 10 employés à son bord, effectuant le trajet entre Athènes et Thessalonique, se sont percutés à 160 km/h alors qu’ils roulaient sur la même voie en sens inverse. Les deux locomotives ont été anéanties par le choc et les trois premiers wagons du train ont déraillé, broyées par l’impact, ce qui a provoqué un incendie. On dénombre 57 victimes. Parmi elles, de nombreux étudiants qui rentraient à Thessalonique après un week-end prolongé à Athènes du fait d’un jour férié en Grèce. Les pompiers et secouristes sur place ont décrit des scènes « apocalyptiques », de nombreux corps ont été entièrement carbonisés et n’ont pu être identifiés qu’à la suite de prélèvements ADN. Le premier ministre grec, Kyriakos Mitsotakis, s’est rendu sur place et a décrété un deuil national de trois jours. Le ministre des transports a quant à lui remis sa démission dans la foulée. Il a été suivi par l’ensemble de la direction de la compagnie des trains grecs Hellenic Train. Quelques jours plus tôt, il avait affirmé que le réseau ferroviaire fonctionnait sans problème dans le pays, comme le note Libération.

Après le drame, le réveil social

Dans les jours qui ont suivi cette catastrophe, les rassemblements à la mémoire des victimes se sont multipliés. Le secteur ferroviaire s’est mis en grève et les universités ont été occupées par les étudiants. Comme le rapporte Le Figaro, le slogan qui fédère les Grecs est « appelle-moi en arrivant », en référence à un message envoyé par une mère à son fils mort calciné dans l’accident. Ce slogan révèle le passage du deuil et du chagrin à la colère. Le train est censé être le moyen de transport le plus sécurisé au monde, les accidents ferroviaires sont les plus rares. Il est absolument aberrant que ces deux trains se soient retrouvés face à face. Si l’on s’intéresse aux causes immédiates de l’accident, le responsable est le chef de gare de Larissa qui a fait une erreur d’aiguillage. À première vue, on a donc affaire à une erreur humaine. Mais il serait simpliste de faire porter le chapeau à cet homme qui, selon l’article cité supra, n’était en fonction que depuis trois jours, n’avait pas d’expérience et travaillait auparavant au ministère de l’éducation nationale. Le premier ministre grec a lui-même reconnu qu’il ne s’agissait pas uniquement d’une erreur humaine. Le problème que ce drame met en évidence est donc plus profond.

Depuis la crise financière et économique de 2008, la Grèce a été le pays le plus maltraité par les politiques d’austérité imposées par les institutions internationales antidémocratiques. La Troïka (Commission européenne, Banque centrale européenne et Fonds monétaire international) a violé la souveraineté du peuple grec, avec la complicité de la bourgeoisie locale, à partir de l’année 2010, lorsque le gouvernement grec a demandé le soutien des institutions internationales face à la dette publique colossale du pays. Comme le relève le site Troïka Watch, cette organisation informelle, sans cadre juridique et ne disposant d’aucune forme de légitimité, a saigné la Grèce en lui imposant des politiques d’austérité. Elle ne s’est pas intéressée aux facteurs aggravants de la dette publique en Grèce, comme les taux d’imposition très bas, la fraude fiscale et la corruption, mais a préféré viser les salaires et les dépenses sociales. L’accord passé avec les créanciers de la Grèce en juillet 2015 par le social-traître Alexis Tsipras a aggravé la situation en exigeant notamment de nouvelles privatisations de la part de L’État grec. L’État a donc été contraint de vendre au rabais ses services publics pour redresser ses finances. C’est ainsi qu’en 2017, l’entreprise publique de transport de voyageurs Hellenic Train a été rachetée au quart de sa valeur par le groupe ferroviaire italien Ferroviaire Dello Stato Italiane (FS). Mais le groupe ne s’occupe que de la circulation des trains. La maintenance et l’entretien du réseau ferroviaire sont toujours assurés par la compagnie grecque OSE ; l’État a donc sa part de responsabilité. La catastrophe ravive la colère que ressentent les Grecs après des années sous le joug de la xénocratie de la Troïka. Le gouvernement doit annoncer des élections nationales le 9 avril.

La faute au secteur privé ?

Il faut à tout prix éviter une lecture simpliste de l'événement selon laquelle la privatisation d’Hellenic Train serait au fond la seule cause de l’accident, et que si la société était restée dans le giron de l’État grec, tout cela ne serait jamais arrivé. Une telle lecture renvoie à un imaginaire social-démocrate qui sacralise l’État en faisant de lui le garant de l’intérêt général par essence. Or il suffit de regarder la situation déplorable des services publics en France pour se rendre compte qu’un État en déliquescence ne vaut pas mieux qu’une entreprise capitaliste. Dans l’affaire qui nous occupe, l’État grec doit répondre de ses défaillances au même titre que le gestionnaire des trains. Le Monde, dans son article papier du 7 mars « En Grèce, les manifestants dénoncent un secteur public en miettes », révèle que l’entreprise publique OSE, chargée de l'infrastructure ferroviaire, ne dispose pas des moyens financiers suffisants pour mener à bien sa mission d’entretien du réseau. La signalisation en particulier n’a pas été renouvelée depuis une vingtaine d’années. Les mises en garde répétées des représentants syndicaux ces dernières années n’ont pas été entendues : « Malheureusement, nos demandes constantes de recrutement de personnel permanent, de meilleure formation mais surtout d’adoption de technologies de sécurité modernes ont toutes été jetées à la poubelle », a déploré la Confédération grecque des cheminots. Plutôt que de blâmer dogmatiquement le secteur privé, c’est la logique du libéralisme économique qu’il faut remettre en cause. La recherche permanente du profit a des conséquences délétères dans les secteurs comme les transports où c’est la satisfaction des besoins qui devraient primer.

Ainsi, au-delà de l’erreur du chef de gare, l’accident a été causé par le manque de personnel et d'entretien sur le réseau ferroviaire grec. Qu’ils soient publics ou privés, ces gestionnaires sont plus préoccupés par leurs finances que par la sécurité des usagers. Cette catastrophe illustre hélas une fois de plus les conséquences désastreuses de l’application de la logique de la rentabilité aux secteurs qui doivent relever du service public. Les accidents de ce genre devraient nous alerter, nous Français, car ils montrent jusqu’où peut mener la gestion néolibérale qui sévit aussi chez nous. À bon entendeur, salut !

Partager
À la Une

Écologisme et sacré : le cas d'Extinction Rebellion

Barrès en héritage

Qui sommes-nous ?
L'Affranchi IHT est le média de
l'Institut Humanisme Total
En savoir plus
Soutiens-nous
Finance ton média
affranchi de l'idéologie dominante
Faire un don
picto facebook Institut Humanisme Total picto youtube affranchi IHT picto twitter Institut Humanisme Total picto instagram Institut Humanisme Total picto discord Institut Humanisme Total
cours et formations Institut Humanisme Total formations politiques et cours de philosophie marxiste loic chaigneau
Forme-toi
Pour transformer ta compréhension
de l'information
Institut
Rejoins-nous
Adhère à l'Institut Humanisme Total
à partir de 10€ par an
Adhérer
International

Brésil : un putsch manqué et de profondes divisions

Pérou : le président évincé par la tyrannie du parlementarisme bourgeois

Plus d'articles
LES PLUS LUS
bibliographie conseils de lecture Institut Humanisme Total bibliothèque Voir la bibliothèque livres librairie Institut Humanisme Total bibliothèque Acheter les livres Marx FM Podcast marxiste marx communisme Institut Humanisme Total Écouter Marx FM
picto formation diplome picto vidéos picto i picto theorie picto actualites